FADE IN 2: EXT. MODERNIST HOME – NIGHT | Numéro

Dec 01 2017


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AU CŒUR DES BALKANS

L’initiative Balkan Projects de Marija Karan, soutenue par le Swiss Institute, offer une occasion rare de se pencher sur la passionnante scène artistique des Balkans.

Visite guidée à Belgrade.

Art – Balkans Projects

Par Thibaut Wychowanok-Dumas

C’est en Serbie, au cœur d’une villa au passé trouble et sulfrureux, que l’actrice et amoureuse des arts Marija Karan a choisi d’inaugurer la première exposition Balkan Projects. “À travers ce projet, explique la jeune blonde d’origine serbe aujourd’hui installée en Californie, je veux amener les artistes des Balkans sur la carte de l’art contemporain mondial. Je suis fascinée par l’énergie de la scène artistique de Los Angeles et je voudrais participer à render advantage visible celle de ces pays européens qui font face à des réalités éconoiques et matérielles plus complexes.”

Première étape de ce projet, l’exposition Fade in 2, réalisée en partenariat avec le Swiss Institute, s’est installée cet été à Belgrade dans l’un des lieux les plus singuliers du musée d’Art contemporain de la ville: une bâtisse moderniste de 1934, passé entre les mains d’un couple de collectionneurs, apparatchiks du régime communiste, puis entre celles d’un mafieux assasiné en 1998 dans les lieux mêmes de l’exposition. Une histoire digne d’un polar hollywoodien…qui colle parfaitement avec l’événement imagine par ses deux curateurs, Simon Castets et Julie Boukobza. “Ce lieu, tellement cinématographique, est évidemment ideal pour accueillir une exposition qui s’intéresse à la manière don’t lart dialogue avec le cinema ou est représenté dans les films (et à la television)”, explique le duo. Dans la cour de la villa, digne de Beverly Hills, le Serbe Rasa Todosijevic (né en 1945) a installé de grands posters publicitaires d’un film qui n’a jamais existé. On y voit une femme et son œil de verre inquiétant face à un homme barbu, de dos. L’image joue avec les codes hollywoodiens tout en instillant une tension plus soured et profonde : un écho au trauma provoqué par la violence et les guerres en Yougoslavie ainsi qu’à leurs stigmates. Installer cette œvre sur les lieux mêmes d’un meurtre mafieux ne doit rien au hazard…

L’exposition met ainsi en avant de grandes figures des Balkans (Rasa Todosijevic a représenté son pays à la Biennale de Venise en 2011), mais aussi de plus jeunes artistes (les commissaires ont explore la scéne locale, visitant notamment l’artist-run space U10 à Belgrade). Mais Fade in 2 s’attache aussi à creuser sous la surface des beaux atours du 7 art en faisant appel à des artistes internationaux don’t le travail sur le systéme hollywoodien ou sur le cinema est reconnu : Alex Israel et Christian Marclay entre autres. “L’un des objectifs de Balkan Projects, explique Marija Karan, est d’inclure les artistes issus des Balkans dans une discussion plus large, mondiale. Et également de proposer cette discussion aux populations des Balkans. Belgrade n’est qu’une première étape.” En espérant que Balkan Projects se déplace également en Europe de l’Ouest et aux États-Unis.

Cetrains artistes n’ont pas attend. Darja Bajagic (née en 1990 au Monténégro) a suivi depuis longtemps un parcours international. Après des études à Portland et un diplôme obtenu à la Yale University School of Art, elle sera exposée au Luma Westbau à Zurich, au musée d’Art modern de Varsovie et à New York où elle s’est installée. Bajagic s’est rapidement fait une renommée ans le milieu de l’art à coups d’œvres qui mêlent efficacement sexe, meurtre et violence. On connaît sa passion pour l’imagerie pornographique du Net ou pour celle des serial killers, qui fait de ses pieces de bons résumés de notre époque obsessionelle où les images les plus choquantes sont sans cesse l’object de réappropriations. Lors de la dernière edition de la FIAC, la New Galerie, qui représente l’artiste, proposait ainsi un lot de haches recouvertes d’images trouvées au hazard de ses recherches sur le Net (tapez “axes and girls” sur Google…) À Belgrade, celle qui, selon la légende s’est fait traiter de folle par l’historien de l’art Robert Storr – toujours un bond point pour un artiste – proposait une pièce inspire du film WR: Mysteries of the Organism (1971) de Dusan Makavejev. Dans la satire du cineaste yougoslave, une jeune prolétaire séduit un célèbre painteur sur glace évoquant Joseph Staline…jusqu’à ce qu’on retrouve la tête de la jeune femme décapitée par un patin. Dans son tableau, Darja Bajagic propose une version actualisée de la figure feminine en sang, issue cette fois-ci des images de la guerre des années 90 qu’elle se souvient d’avoir vues en ligne plus jeune. L’artiste construit ainsi habiliment un pont entre les drames des années 70 et ceux plus récents.

Nous replonger dans un cinema de l’ex-Yougloslavie encore trop méconnu est un autre atout de Fade in 2. La sculpture votive de la Serbe Aleksandra Domanovic, en rendant homage au film Landscape with a Woman (1989) d’Ivica Matic, nous convie en effet dans l’historie savoureuse du long-métrage. On y découvre Sumar, un homme au penchant affirmé pour la peintrue de paysages et les nu féminins, mettre en émoi toute sa petite ville. Peut-être est-ce simplement ce que l’on doit attendre de l’art, sur les écrans comme dans la vie.

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